Jardin thérapeutique enrichi: définition

Jardin thérapeutique enrichi: définition

Contexte

La transition démographique qui s’opère dans une grande majorité de pays à travers le monde porte l’urgence pour les différents états à définir des politiques de santé publique adaptées au vieillissement des populations : la population des plus de 65 ans passera de 1 milliard en 2020 à 2,1 milliards en 2050. Les enjeux sont énormes et ils se traduisent en moyens humains, parcours gérontologique, réponses thérapeutiques et moyens financiers.

Avec l’augmentation de la dépendance, il convient de souligner les besoins croissants que les personnes âgées vont solliciter auprès des actifs pour faire face à leurs activités quotidiennes.

Les maladies neuro-cognitives dont la prévalence moyenne est de 67% dans les EHPAD à travers le monde, (WHO, Alzheimer.org, NHS reports 2020) constituent également un enjeu majeur pour la prise en charge au sein d’institutions MS.

Aux moyens humains et financiers nécessaires, il convient de souligner la place et le rôle de l’environnement sur la santé, le bien-être et la qualité de vie du sujet âgé.

Cet aspect insuffisamment pris en compte dans le développement des établissements gériatriques de la fin du XXème siècle laisse un héritage architectural et environnemental souvent remis en question voire critiqué aujourd’hui.

De nombreux travaux scientifiques depuis les années 2000 se sont efforcés d’identifier et de décrire les associations significatives qui existent entre l’environnement et la qualité de vie.

Ces travaux reflètent combien la santé, le bien-être du sujet âgé sont fortement dépendants du cadre de vie auquel les personnes sont exposées. Certains vont permettre de préserver des capacités, d’autres vont en accélérer la dégradation – observables par une amplification des troubles du comportement, des chutes ou de la désorientation spatiale.

D’autres enfin vont encourager le lien social, l’engagement dans des activités, voire la récupération de certaines facultés – pour les gestes quotidiens ou les capacités cognitives notamment pour celles atteintes de maladies neurocognitives.

Nos travaux de recherches nous ont conduit à explorer les potentialités de l’environnement et en particulier du jardin en institution psycho gériatriques. Ceci afin d’en apprécier les effets réels sur la santé et le bien-être des résidents. C’est ainsi que nous avons été conduits à décrire le concept de jardin enrichi. L’objectif de cet article est de poser les cadres conceptuels et de présenter les opportunités que présente ce concept pour les personnes vivant en institution.

La notion d’environnement sain

La déclaration de Stockholm sur l’environnement humain en 1972 a reconnu dans son Principe Premier : « L’homme a un droit fondamental à la liberté, à l’égalité et à des conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité lui permette de vivre dans la dignité et le bien-être »

Dans son rapport rendu à l’issue de la Conférence de Rio en 1992, l’OMS déclare « un environnement sain est la condition préalable à la réalisation d’autres droits humains ».

Cette déclaration est complétée en 2002 à propos du vieillissement par la phrase suivante « un milieu physique adapté peut faire toute la différence entre indépendance et dépendance pour les individus, mais il revêt une importance particulière pour les personnes âgées ».

Le concept d’environnement sain s’inscrit ainsi comme un droit individuel et collectif à bénéficier d’un espace de vie de qualité, d’un point de vue physique, psychologique et social.

Si cette notion s’est forgée à l’origine en réaction à des problématiques environnementales (pluies acides, pollutions industrielles, risque nucléaire), elle a trouvé une place parfois mal définie à la croisée du droit environnemental et du droit à la santé.

Les enjeux principalement cités concernent les pollutions atmosphériques, chimiques et de l’eau. Mais ils décrivent également les questions d’hygiène associées à des problèmes de salubrité, ils s’étendent à l’environnement professionnel, au cadre de vie d’une façon plus générale, associant la nutrition, l’éducation, le logement, le milieu urbain, les nuisances sonores et la qualité de l’air.

Les champs d’interactions sont immenses convoquant autant des questions de diagnostics, de gestion des risques, de règlementation que d’éducation à la santé.

C’est dans ce cadre conceptuel, que se développent des notions telles que l’écologie humaine (Ralph Waldo Emerson), la psychologie environnementale (Proshansky, Ittelson 1974), l’anthropologie et la question de la nature de Philippe Descola (2011), les travaux de distinction entre nature et culture, humain et non-humain  (« Nous n’avons jamais été modernes » de Bruno Latour).

L’environnement capacitant

Progressivement, l’environnement s’est affirmé au cours des dernières décennies comme un acteur essentiel de la santé. Il se prolonge avec la définition apportée par Pierre Falzon en 2005 avec la notion d’environnement capacitant, intervenant sur le pouvoir d’agir des individus : « L’environnement capacitant est sensible aux différences interindividuelles […] (âge, sexe, culture), compense les déficiences liées à l’âge, aux maladies, aux incapacités et prévient l’exclusion »

1/ Comment le jardin a-t-il pris un sens sur la santé Du jardin traditionnel au jardin thérapeutique

Les amateurs de jardin lui revendiquent d’être avant tout un espace de nature. Il n’en est primairement que la représentation humaine. Transférant à cet espace clos (hortus gardinus signifie jardin entouré d’une clôture) une visualisation d’un idéal imaginaire, le jardin a voyagé à travers les cultures et les civilisations.

Il a matérialisé dans son architecture, sa palette végétale, ses matériaux des aspirations philosophiques, religieuses et politiques.

Le jardin d’Eden, les jardins de Babylone, les jardins médiévaux ou andalous, les jardins des lettrés chinois, les jardins royaux ou les jardins anglais… chacun d’entre eux démontre une domination de l’homme sur la nature au service d’une idéologie, d’un courant de pensée, d’une religion ou d’une emprise politique sur un territoire.

Cette codification du monde réduite dans l’espace d’un jardin prend aujourd’hui une dimension presque mystique, idéalisée dans une période elle-même en quête de spiritualité.

L’Hortus conclusus

Cette codification est bien réelle – elle est un mélange de poésie inspirée par l’Hortus conclusus – comme une représentation du Cantique des Cantiques « Hortus conclusus soror mea, sponsa ; hortus conclusus, fons signatus » – (Ma sœur et fiancée est un jardin enclos ; le jardin enclos est une source fermée). ».

Cet Hortus Conclusus devenu au Moyen Age l’espace dédié au culte de la Vierge Marie associé à une vision paradisiaque – est la vision qui a voyagé jusqu’aujourd’hui lorsque l’on parle de jardin médiéval.

Cette représentation est idéalisée par le plan retrouvé au Monastère de St Gaal en Suisse alémanique. Fort de cet héritage historique, soutenu par les prouesses de paysagistes talentueux, le jardin s’est doté dans la conscience collective d’infinies vertus.

L’église catholique mais aussi l’Islam, utilisèrent le jardin comme vecteur de la représentation de leur idéal religieux. Celui-ci permettait en complément de l’iconographie d’être un support populaire à la représentation des valeurs religieuses voire du paradis (pairidaēza à l’origine en iranien avestique).

2 /Le concept de jardin thérapeutique

Le terme « jardin thérapeutique » est une notion qui a fait son apparition au cours des années 1990, sans bénéficier de la définition d’un cadre conceptuel précis. Il était une traduction du terme « healing garden (expliquer la traduction) » qui met davantage en avant (faire une phrase supplémentaire) la présence de plantes médicinales et fait référence aux jardins des Monastères au Moyen-Age où elles étaient cultivées.

L’accueil favorable qui est fait au jardin en forme par essence un espace idéal pour accueillir une mission thérapeutique.

Non seulement parce que la construction sociale en a fait un lieu vertueux et populaire, mais aussi parce que son aménagement ou son adaptation est soumis à moins de contraintes financières et règlementaires que les bâtiments.

Parmi les premières publications qui fondèrent le concept de jardin thérapeutique, il y a les travaux de R Ulrich (Ulrich, 1984) qui démontraient que la vue sur un jardin depuis la fenêtre d’une chambre d’hôpital accélérait la convalescence post-opératoire.

De nombreuses suivirent, mais il faut noter que les établissements de santé n’attendirent pas la contribution de la recherche pour doter leurs hôpitaux, dispensaires, mais aussi les sanatorium de jardins ou de parcs (Grandvoinnet, 2010) ; on y vantait à la fin du XIXème et début du XXème, les bénéfices d’un parc paysager sur la santé des tuberculeux.

Le concept de Green Care

Les anglo-saxons décrivirent le concept de Green Care (“(16) (PDF) Green Care: a Conceptual Framework. A Report of the Working Group on the Health Benefits of Green Care,” n.d.)

Si l’on se reporte à l’ouvrage de C. Cooper Marcus (Healing Gardens 1995), la définition s’énonce ainsi : « Un sens général désignant des jardins ayant un effet positif sur le stress et d’autres influences positives sur les patients ».

Il s’agit principalement d’un espace extérieur, souvent assimilable à un jardin, implanté dans un établissement médico-social.

La démarche générale de conception du jardin thérapeutique est centrée sur l’adaptation à l’environnement présent dans l’établissement médico-social où il est projeté, et la réponse aux exigences liées à l’ergonomie et la sécurité (= accessibilité) – si bien que lorsque l’on se reporte à la littérature qui lui dédiée, le jardin thérapeutique reste une notion relativement floue, tant dans ses attributs que sa finalité.

L’environnement enrichi : laboratoire de recherches pour le jardin enrichi

Le concept d’environnement enrichi a été décrit pour la première fois par Donald Hebb, un neuropsychologue de l’Université de McGill (Montréal).

Les travaux qu’il a mené à partir de 1946 sur des populations de souris vivant dans des cages avec des niveaux progressifs d’aménagement ont permis de démontrer dans un premier temps que celui-ci avait un effet significatif sur leur capacité à résoudre des problèmes.

L’aménagement des cages a été faite de façons différentes les unes sans éléments particuliers en dehors d’une mangeoire et d’un abreuvoir, les autres avec des accessoires qui vont par des activités ludiques, stimuler leurs capacités cognitives.

  •  roues
  • labyrinthes complexes et changeants
  • problèmes à résoudre pour accéder à la nourriture
  • échelles et bascules

Mais aussi la convivialité par le partage de l’espace avec d’autres congénères.

C’est au cours des années 60, avec une équipe de chercheurs américains composée de Bennett, Diamond, Krech & Rosenzweig, que la notion d’environnement enrichi révèle son potentiel.

Comparant différents types d’environnements, les uns appauvris, les autres enrichis, des expériences répétées ont permis d’établir une véritable correspondance entre l’enrichissement de l’environnement et le volume et l‘épaisseur du cortex cérébral.

L’une des expériences phare:

Conduite par l’équipe du laboratoire américain de l’Institut national de Santé mentale (National Institute of Mental Health), comparent une exposition pendant une durée d’un mois d’un groupe de rat à ce qu’ils appellent ECT (Environment complexity & Training) c’est-à-dire un environnement complexe et stimulant, d’un autre groupe de rat placé en IC (Isolated conditions) autrement dit à l’isolement.

Une exposition est programmée par séquence de 30 minutes par jour pour le groupe ECT, dans un espace stimulant les fonctions cognitives dans lequel des croquettes sucrées étaient distribuées à chaque succès dans la résolution d’un problème.

La composition de cet espace étant modifié chaque jour. Pendant ce temps, le groupe IC restait dans une cage aux trois côtés fermés et avec un accès non restrictif à la nourriture et à l’eau.

L’idée que l’environnement puisse avoir un effet sur le comportement ou les capacités cognitives était une donnée globalement acquise soutenue par les différentes observations faites sur des individus en fonction du milieu dont ils étaient originaires.

Cela participait et renforçait les théories développées dans les sciences de l’éducation.

De nombreuses publications scientifiques

Par contre que le cerveau d’une souris puisse s’accroître et se ramifier en fonction de l’exposition à l’environnement, et qu’il contribue à en modifier la taille et la structure ouvrait des perspectives qui furent ensuite explorées dans de nombreux laboratoires :

  • Une équipe chinoise démontre que l’hypo-perfusion cérébrale chronique risquant de provoquer des troubles cognitifs par une expression réduite de CREB phosphorylé, est compensée par un EE.
  • Des japonais confirment que l’EE permet de compenser les déficiences de mémoire de souris avec une mutation PACAP -/-
  • Une équipe indienne souligne que l’EE permet de réduire le risque de syndrome dépressif chez des souris affectées par des troubles cognitifs et restaure la plasticité synaptique anormale de l’hippocampe.
  • Des chercheurs israéliens de l’Université Ben Gourion observent que des souris exposées à un EE ont montré un net progrès dans la guérison des lésions cérébrales.

Utilisant le test de reconnaissance d’objets nouveaux et d’orientation à l’intérieur de labyrinthes, ils ont tenté de déterminer le niveau de fonctionnement mémoriel et cognitif des souris placées dans des cages standard par rapport à celles se trouvant dans des environnements enrichis – cages plus grandes contenant des stimuli supplémentaires, des roues pour courir, de la nourriture et de l’eau en quantité, un espace ouvert, et des objets à explorer régulièrement changés.

D’autres publications soulignèrent les bénéfices de l’environnement enrichi sur la perception de la douleur, la maladie de Parkinson, la maladie d’Alzheimer. Sils foisonnaient dans le modèle murin, peu de transpositions à l’homme issues d’une démarche de recherche translationnelle virent le jour.

Il faut noter cependant des travaux conduits sur l’autisme et l’enrichissement environnemental. Une étude randomisée, contrôlée sur des enfants autistes démontrait après 6 mois d’exposition à un environnement enrichi, que parmi les participants, 21%  d’entre eux ne répondaient plus aux critères qui les avaient classifiés en tant qu’autiste avant l’étude.(Woo et al., 2015)

Le concept de jardin enrichi

Le jardin enrichi est une innovation résultant de l’association du concept de jardin avec celui d’environnement enrichi.

En cela, il offre au jardin une définition nouvelle et spécifique.

Comme il convient de le faire dans la description d’un concept innovant, en référence à la caractérisation d’un concept décrite en 1923 par Ogden & Richards, il convient d’en apprécier la portée des 3 dimensions : dénomination, compréhension et extension.

Définition du jardin enrichi : le jardin enrichi est un espace extérieur aménagé dans des limites éventuellement définies par une clôture, pour lequel la végétation a été enrichie de de modules spécifiquement conçus et choisis afin de favoriser la fréquentation, l’appropriation, le bien-être et les marqueurs de santé des personnes qui le fréquentent.

A l’inverse de la conception d’un jardin traditionnel qui se fonde sur l’adaptation à l’environnement, celle du jardin enrichi est fondée sur l’humain et la (ou les) pathologie(s), le (ou les) troubles dont il est atteint afin d’y apporter une médiation bénéfique.

 

Jardin thérapeutique enrichi : définition – Compréhension 

Familiarité : :  la compréhension est instantanée dès lors que le terme est perçu par une audience familière du concept d’environnement enrichi. La problématique pour la compréhension réside principalement dans l’appréciation du type d’enrichissement contenu.

 Résonance : La présence du mot « jardin » dans la dénomination ouvre une familiarité importante qui peut potentiellement par excès de familiarité atténuer la perception du concept de « jardin enrichi » par rapport à un « jardin conventionnel »

Parcimonie : La simplicité des termes utilisés est assurément un facteur favorable à l’adoption du concept. La caractérisation des attributs principaux qui lui sont associés : fréquentation, appropriation et bénéfices sur la santé en renforcent la légitimité tout en lui offrant une certaine exigence

Cohérence : le concept associant jardin et environnement enrichi dans ses attributs et ses objectifs en assure la cohérence.

Différenciation : la différentiation en est formée par ses 3 attributs majeurs et la caractérisation qui en est faite par une activité de recherche scientifique avant celle de conception architecturale.

Profondeur : le principe de recherche scientifique qui fonde le concept, les objectifs de santé qui l’accompagnent en forment la profondeur

Utilité théorique : le concept ouvre un champ nouveau dans le développement et l’usage du jardin par rapport à la perception actuelle. Bien que celle-ci soit parfois polluée par l’idée reçue que n’importe quel jardin, sans attribut spécifique puisse offrir les mêmes fonctions

Utilité de champs : le concept de jardin enrichi offre des ouvertures d’extensions vers de nombreux champs qui restent à explorer tels que la prévention des maladies professionnels, l’espace urbain, mais aussi la transposition du concept d’« environnement enrichi » vers d’autres espaces que le jardin.

Jardin thérapeutique enrichi : définition – Les principaux attributs du jardin enrichi

L’appropriation 

nous n’avons pas identifié de publications s’intéressant au concept et au processus d’appropriation de son environnement par un résident en EHPAD. Il s’agit pourtant d’un enjeu essentiel dès lors que l’environnement est considéré comme un facteur déterminant pour la qualité de vie et la santé du résident.

Plusieurs modèles ont cependant contribué à décrire le processus d’appropriation d’un espace public et les facteurs qui y participent. On citera notamment les travaux de GN Fischer (1975) ou de Ripoli & Veschambre (2005).

Et ainsi que le souligne K Popper ou R Boudon, chaque individu n’abordera pas l’appropriation dans une dynamique collective, mais à l’issue d’un processus personnel et individuel.

Son mode d’appropriation d’un jardin enrichi définira son rythme de fréquentation et la nature des interactions qu’il établira avec l’espace. Notre travail de recherche consiste à travers une étude qualitative à identifier les différentes étapes du processus d’appropriation du jardin enrichi par les résidents, à caractériser les modes d’appropriation à travers les interactions qu’ils établissent avec le jardin.

Ce travail innovant dans le jardin est également riche d’enseignement sur les interactions qu’établissent une personne âgée en institution avec son environnement. Il conviendra également de mettre en relation ce processus avec celui décrit par GN Fischer, mais aussi Ripoli et Veschambre dans l’espace public.

Un suivi et un enregistrement de la fréquentation par un groupe de résidents participants à l’étude, permettra de vérifier s’il existe une relation significative entre l’appropriation et le rythme de fréquentation.

Jardin thérapeutique enrichi : définition – des effets positifs sur la santé et le bien-être :

C’est sans doute ici l’enjeu ultime du jardin enrichi. Conçu à partir et autour de la santé du résident, l’environnement du jardin doit l’accompagner vers un sentiment de bien-être, une qualité de vie et une préservation voire une amélioration de ses marqueurs de santé.

Une étude pilote contrôlée conduite en comparant des résidents en EHPAD atteints de la maladie d’Alzheimer à un stade avancé, répartis entre un groupe contrôle (ne fréquente pas de jardin), un groupe fréquentant un jardin sensoriel conventionnel (JSC) et un jardin enrichi (JE) a été publiée en juin 2021 dans la revue Alzheimer Research & Therapy.

Cette étude met en évident que les participants du  groupe (JSC) ne présente aucune différence significative avec le groupe contrôle et marque une dégradation continue de ses capacités cognitives et de son indépendance fonctionnelle ; alors que les participants du groupe JE se caractérisent par une récupération de capacité sur les échelles de mesure respectivement MMSE et ADL.

Des études complémentaires se sont révélées nécessaires, afin d’élargir l’évaluation des effets du jardin enrichi sur les principales échelles utilisées en gériatrie et en particulier celles pour lesquelles il existe déjà des indications dans la littérature : les troubles du comportement, le lien social, l’estime de soi. Mais il convient également de caractériser la relation entre appropriation et bénéfice sur la santé et la qualité de vie.

Les perspectives

Les perspectives offertes par ces travaux de recherche sur le jardin enrichi. Ils devraient contribuer à décrire les interactions d’un résident en EHPAD avec son environnement et identifier les facteurs qui les favorisent. Conçus autour de la satisfaction du résident, fondé sur une activité de recherche, le jardin enrichi peut-il être prédictif des améliorations qu’il est susceptible de produire. Il ne faut pas écarter cependant que chaque personne se résout suivant des règles qui lui sont propres et l’on ne peut décrire le jardin comme un design universel. C’est par l’anticipation dans la conception du jardin enrichi, des attentes du plus grand nombre que l’on pourra tendre vers une généralisation de ses bienfaits.

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Jardin thérapeutique sensoriel

Jardin thérapeutique sensoriel :

Quelle différence entre un jardin sensoriel et un jardin thérapeutique ?

Il semblerait que de nombreuses confusions soient possibles, à propos du jardin thérapeutique sensoriel. Ainsi, de nombreux jardins conçus comme des jardins sensoriels sont finalement qualifiés de jardins thérapeutiques  et inversement. A priori le sens est porté par l’attribut. Un jardin sensoriel se définit par une importance particulière portée à la sensorialité. C’est à dire à la valorisation des différentes formes de stimulations sensorielles: vue, odorat, toucher, goût, ouïe.  Nous développerons plus bas en quoi cette stimulation sensorielle participe ou peut participer d’une démarche thérapeutique.

Cependant, un jardin thérapeutique est un concept mal défini quant à ce qui le constitue, mais suggère que son design participe d’une démarche thérapeutique. Lorsque l’on consulte les différentes publications à ce sujet. Il n’existe pas un consensus clair sur la notion de thérapie relative à la fréquentation d’un jardin. D’autres articles développent par ailleurs les connaissances principales acquises à ce sujet:

C’est ainsi que sans possibilité de prouver de façon claire la dimension thérapeutique d’un jardin thérapeutique, nos travaux de recherche nous ont conduit à définir le concept de jardin enrichi thérapeutique.

Jardin thérapeutique sensoriel

Celui-ci dispose à la fois d’une dimension sensorielle et d’une dimension thérapeutique.

Jardin thérapeutique sensoriel:  Pourquoi? Comment ?

La mobilité réduite de nombreux résidents signifie qu’il faut davantage d’éléments paysagers conçus pour ajouter de l’intérêt et du plaisir. Et ils devraient être placés à des intervalles plus courts. Afin de compenser les distances réduites que certains résidents peuvent parcourir confortablement. La distance réduite et la vitesse de marche lente de la plupart des résidents signifient que les espaces doivent contenir plus de variété et plus d’éléments. Ceux-ci doivent être visuellement intéressants sur une surface plus petite que ce qui serait nécessaire dans un espace conçu pour le grand public.

Cet ajustement à la mobilité suggère donc une plus forte concentration spatiale des éléments de stimulation sensorielle. Mais ce besoin de sensorialité a également d’autres justifications, qui vont conduire à l’ajuster différemment en fonction des besoins des résidents.

  • Il peut s’agir d’une adaptation à la déficience sensorielle de certains ou de tous les résidents. Ce sera le cas particulier dans un EHPAD pour personnes atteintes de cécité partielle ou totale. Mais cela concernera généralement le cas de nombreux établissements accueillant des personnes âgées souffrant de différentes altérations de la perception: souvent auditive, visuelle ou gustative.
  • Cela va concerner également une évolution de la perception sensorielle liée à l’évolution de pathologies neuro-cognitives (notamment maladie d’Alzheimer, démence à Corps de Lewy, démence parkinsonienne).
  • Cet ajustement sensoriel prendra des dimensions différentes dans le cas notamment de jardins pour autistes qui inversement pourront avoir développé une hypersensibilité notamment à la lumière ou aux sons.
  • Enfin, il a été observé que la stimulation sensorielle, au-delà du besoin de compenser certains déficits, sera un moyen de solliciter l’interaction du résident avec son environnement

Un article a été dédié à la description des moyens possibles de stimuler les sens dans un jardin. Cliquer ici

Jardin thérapeutique sensoriel : sensoriel ou thérapeutique ?

Les jardiniers anglais ont porté beaucoup d’attentions à cette notion dans la description du « sensory garden« . La fondation Thrive a fortement contribué à communiquer sur la cette dimension. De notre côté, nous restons prudents dans la qualification de thérapie, notamment lorsque l’on se trouve dans le traitement de maladies chroniques.

Très certainement, notamment pour des personnes résidant dans un lieu dominé par une forme d’architecture hospitalière. Le contraste apporté par la fréquentation d’un jardin quelque peu sensoriel, ne peut être que bénéfique. Il conviendrait cependant de soutenir cette intention avec des études scientifiques ayant valeur de preuves – ce qui manque encore aujourd’hui.

 

 

 

 

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Jardin thérapeutique enrichi en EHPAD

Jardin thérapeutique enrichi en EHPAD: Le rôle de l’environnement physique

Le jardin thérapeutique enrichi en EHPAD est un enjeu important lié à l’évolution des populations qui y sont accueillies. L’allongement de l’espérance de vie entraîne une forte augmentation du nombre de personnes très âgées, fortement touchées par des maladies chroniques, des polypathologies et des maladies neurocognitives.

Une proportion importante d’entre elles vit dans des institutions gériatriques. En Europe, on estime que 3 millions de personnes âgées vivent en EHPAD ou équivalent  (Cushman et Wakefield 2019) en raison d’une perte d’autonomie fonctionnelle et/ou de handicaps liés à des troubles cognitifs, principalement liés à la maladie d’Alzheimer.

Il y a donc un défi important pour ces institutions gériatriques à offrir une gamme de services de soins qui répondent à la fragilité croissante de leurs résidents, tout en offrant un cadre de vie qui compense utilement l’abandon de leur domicile.

A cet égard, l’environnement a été régulièrement mis en avant comme un facteur important de qualité de vie, de bien-être et de santé. De nombreuses publications ont souligné l’effet majeur de l’environnement bâti pour répondre à cette préoccupation (Day et al., 2000).

L’environnement physique est essentiel tant pour offrir un cadre de vie agréable que pour atténuer les troubles et les déficiences liés à l’âge. Le rôle de l’environnement physique sur la santé a été largement exploré par la recherche scientifique, notamment dans les études sur le modèle animal.

jardin thérapeutique enrichi

Des recherches scientifiques récentes améliorent nos connaissances

Dans des travaux pionniers, le neuropsychologue D. Hebb (Hebb, 1947) a réalisé des études d’intervention et constaté qu’un enrichissement de l’environnement permettait d’améliorer les capacités cognitives des souris.

En outre, il est apparu que cette intervention produisait des effets neurobiologiques, en particulier une meilleure capacité fonctionnelle, des connexions neuronales et une réduction de l’anxiété (Görtz et al., 2008).

Suite à ces travaux, des expériences similaires ont été menées sur des souris transgéniques soutenant que l’enrichissement de l’environnement réduit le stress psychologique par rapport à un environnement appauvri (Larsson et al., 2002), ou module fortement la génération d’Aβ (peptides bêta-amyloïdes) in vivo et son impact sur la fonction du système nerveux des animaux atteints de la maladie d’Alzheimer (Jankowsky et al., 2005).

La prévalence de l’épuisement professionnel des soignants, la lutte difficile contre les grands syndromes gériatriques font de la santé et de la qualité de vie des personnes âgées un enjeu majeur qui questionne également l’environnement de l’EHPAD (Havreng-Théry et al., 2021).
Alors que la recherche en santé environnementale se développe, la réalisation d’essais contrôlés randomisés sur des humains, et principalement des personnes âgées, reste critique tant pour des questions éthiques que techniques (Resnik, 2008).
Nous nous demandons donc si l’environnement physique pourrait également influencer la santé des humains vivant en EHPAD.

Par conséquent, nous nous demandons si ces efforts de recherche ont abouti à la conception d’un environnement idéal et si cet environnement a démontré des avantages clairs pour la santé et le bien-être des résidents (Flood, 1995) .

La revue de littérature scientifique que nous avons conduite, en utilisant une équation de recherche ciblée sur l’ensemble des bases de données médicales internationales, a permis de mettre en évidence quelques conclusions intéressantes relativement au rôle de l’environnement sur la santé et le bien-être des résidents.

Le jardin thérapeutique enrichi

Le jardin thérapeutique enrichi y apparait comme étant un des espaces les plus favorables tant dans l’amélioration de la qualité de vie, la satisfaction des aidants, que la restauration ou la préservation des capacités existantes.

Il faut noter toutefois que la question de la facilité d’accès au jardin est un élément important. Il faut que le jardin soit visible et éviter les obstacles pour y parvenir ( verrouillage de portes, ouverture difficile…), au risque de développer un sentiment d’anxiété et de l’agitation.

La lumière et le son

Deux facteurs importants se révèlent également à travers cette étude: la lumière et le son.

La fréquence et l’intensité de la lumière, ainsi que la possibilité de bénéficier régulièrement d’un éclairage par la lumière naturelle, sont des éléments à bien ajuster afin de faciliter l’engagement dans des activités, réduire l’apathie et les troubles du comportement.

De même, un éclairage adapté dans les espaces de restauration, se révèlent déterminants pour favoriser la convivialité leur de la prise des repas.

Des éléments qui ont été mesurés par un meilleur IMC (indice de masse corporelle) et une amélioration des indicateurs de qualité de vie (DemQoL) et le meilleur respect du rythme circadien.

Le son y est relevé particulièrement comme une nuisance lorsqu’il s’agit d’une réduction du bruit, qui affecte l’agitation et la qualité de vie. Par contre, la présence de musique en fond sonore ne participe pas d’amélioration des indicateurs de santé ou de qualité de vie.

La dimension des EHPAD en question

Etonnamment, la dimension des EHPAD avec la tendance actuelle à développer le concept de maisonnée accueillant 8 à 12 résidents, comparée à des configurations traditionnelles ne produit pas systématiquement un bénéfice mesurable sur la qualité de vie, le bien-être et la santé des résidents.

Dans certaines études, ce concept d’architecture de « petite taille » y est favorable, dans d’autres, aucun différence mesurable n’y est observée.

Il convient donc d’apprécier cette évolution avec nuances. Sans doute en lien avec l’ensemble des facteurs en jeu dans le quotidien de la vie en EHPAD,  en particulier le rôle des soignants, le design général et la dimension culturelle.

Favoriser la rénovation intérieure centrée sur le résident

La rénovation d’un établissement, ou d’une partie de l’EHPAD avec une approche centrée sur les attentes du résident produit régulièrement des effets bénéfiques. Il s’agit souvent d’aménagements simples et bien pensés qui permettent d’effacer un peu la dimension hospitalière de l’architecture intérieure.

S’agissant d’augmenter la pénétration de la lumière naturelle, l’introduction de végétale, la peinture des murs ou la décoration intérieure. On observe dans les études concernées, des bénéfices sur la fréquence et la durée des interactions entre résidents et par conséquent de la sociabilisation, ainsi que la réduction de l’agitation.

Les études sur les salles multi-sensorielles (Snoezelen) ne révèlent pas de bénéfice sur la santé

Enfin, l’ensemble des études recensées relativement à l’usage de salles multi-sensorielles (telles que des espaces Snoezelen), révèlent l’absence de bénéfices mesurables sur la santé des résidents. Les études interventionnelles conduites avec des protocoles robustes ne parviennent pas à mettre en évidence des avantages mesurables de la fréquentation régulière de ces espaces par rapport à un groupe contrôle. Et cela en particulier pour des résidents atteints de la maladie d’Alzheimer.

En conclusion

Cette petite synthèse présentée ici, confirme cependant que :

  • l’environnement physique joue un rôle significatif sur la santé et la qualité de vie en institution gériatrique
  • de nombreux paramètres rentrent en jeu et il convient en conséquence de concevoir les EHPAD en plaçant  le résident au coeur des préoccupations
  • les EHPAD ont souvent été conçus avec des enjeux financiers et règlementaires importants, oblitérant trop souvent la qualité de vie du résident
  • le développement des connaissances scientifiques encouragent à la valorisation de cette expertise. Il s’avère que la mutualisation de ces connaissances souligne les effets néfastes qu’un environnement appauvri peut produire. Des efforts continus doivent être poursuivis pour améliorer la conception des EHPAD, si tant est que le. concept de l’EHPAD tel qu’il existe aujourd’hui doive être préservé ?

 

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Biodiversité et jardin thérapeutique

Biodiversité et jardin thérapeutique: C’est une conviction, c’est un engagement, le jardin enrichi à visée thérapeutique doit favoriser le développement de la biodiversité

O Ubi Campi a souhaité renforcer la palette végétale du jardin thérapeutique pour apporter des évolutions sur la valorisation de la biodiversité.

Biodiversité et jardin thérapeutique: Un jardin invitant à sortir

Une sélection de végétaux à feuillage verdoyant et/ou fleurs colorés et à long fleurissement proche de l’entrée principale du jardin

Des plantes et fleurs mellifères, nectarifères, odorantes, avec des baies pour les oiseaux ou constituant un lieu de nidification de la faune, (indigène). Mais aussi un potager, important support de biodiversité. Il doit être adapté aux résidents et aux personnels soignants. Il est placé en hauteur pour le jardinage et la cueillette.

Cela s’accompagne par une gestion différenciée des espaces qui permet d’inverser le bilan environnemental négatif. Il faut préserver et en rétablir la richesse existante des sols, des paysages et du vivant.

Chaque projet fait l’objet d’une analyse spécifique en fonction des écosystèmes particuliers.

Le jardin étant par essence, un espace artificiel, il s’agit de lui redonner le plus largement sa valeur naturelle, ce qui impose souvent de changer du tout au tout notre rapport au jardinage traditionnel qui a introduit progressivement des pratiques contraires à la valorisation de la biodiversité.

Biodiversité et jardin thérapeutique : comment la favoriser?

Si le patient est placé au coeur des enjeux d’un jardin thérapeutique, la valorisation de la biodiversité se doit d’y être associée en permanence. Cela implique des choix raisonnés concernant l’architecture générale du jardin, le choix des matériaux utilisés, la répartition de la flore dans l’espace.

Un sol est dit-on formé par deux composés:

  • l’un issu de la roche mère dit minéral,
  • l’autre organisme issu  des végétaux formant un mille feuille extraordinairement complexe.

La réalité est bien différente.

Les sols en zone urbaine et péri-urbaine, sont constitués de remblais de toutes sortes. Sur la partie supérieure, on a un régalage de terre végétale arrachée par décapage à son milieu d’origine.

Bien entendu, cette pratique ne peut suffire à constituer un sol et n’est pas durable. Les manuels avertis précisent même les épaisseurs de terre végétale : pour les arbres, une profondeur de 1,00 m à 1,50 m voire plus, est préconisée en fosse de plantation.

C’est une ineptie. Il n’existe aucune partie du globe ou de telles profondeurs existent, même sur les meilleures terres agricoles.

Il convient en conséquence notamment :

  • de favoriser le développement des microorganismes dans le sol,
  • d’encourager la présence d’une méga-faune ( taupes, carabes…), d’une macro-faune (lombrics, pseudo scorpions…), d’une méso-faune (acariens, collemboles…) et d’une micro-faune (nématodes, amibes…)
  • et faciliter le foisonnement du règne végétal ( algues, bactéries filamenteuses, champignons, mycorhizes)

Ces préoccupations concernent également la bonne gestion des eaux dans le  jardin. Il est important de bien choisir les types de végétaux en fonction du milieu. La pratique intensive de l’arrosage risque de perturber l’équilibre microbien du sol en favorisant l’arrivée d’organismes qui n’y seraient pas désirés.

D’autres critères entrent en considération tels que:

  • Le choix de plantes mellifères
  • Limiter les besoins et des pratiques d’entretien (le passage d’une tondeuse produit des gaz à effet de serre, et conduit à l’éradication d’insectes pollinisateurs) sans parler de la nuisance sonore lorsqu’il s’agit de matériel thermique
  • Préparer le terrain en vue de la formation de massif qui vient perturber l’équilibre d’un sol
  • La pratique de la taille est faite parfois de manière trop géométrique avec des taille-haie notamment. Elle a pour conséquence le vieillissement prématuré du végétal, sa fragilisation face aux maladies et l’absence de fleurissement. Elle génère aussi un appauvrissement du sol lorsque les déchets végétaux sont évacués vers une décharge verte.
  • La période des pratiques d’entretien qui peuvent entrer en collusion avec celle de multiplication de la biodiversité
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Synthèse sur l’environnement enrichi

L’environnement enrichi est un concept décrit depuis plus de 70 ans, mais c’est avant tout un outil de recherches. Une Synthèse sur l’environnement enrichi permet d’en offrir un aperçu. Nous nous sommes efforcés de le valoriser dans une démarche de recherche translationnelle.
Pour sa recherche sur les jardins thérapeutiques,O Ubi Campi s’est inspiré des travaux initiés par Donald Hebb en 1946 sur la notion d’environnement enrichi et qui a été le point de départ de nombreuses  publications scientifiques

Résumé des recherches sur l’environnement enrichi

C’est en s’inspirant et s’adossant à la multitude des travaux de recherche qui ont été mis en œuvre autour de la notion d’enrichissement de l’environnement – baptisé dès les années 60 – environnement enrichi ou (car les travaux fondateurs ont été conduits par des anglo-saxons).

Les premières publications sur le sujet pourraient sans équivoque être attribuées à Donald O. Hebb. Donald Hebb est un psychologue et neuropsychologue canadien qui a travaillé notamment dans les sciences cognitives en fournissant conception biologique de la psychologie. Une conception qu’il développe dans son livre « The Organization of Behaviour : A Neuropsychological Theory » qui sera publié en 1949.

Synthèse sur l’environnement enrichi: Les travaux de D. Hebb

L’innovation des travaux de D.Hebb est double, d’une part il porte une évaluation sur l’impact de l’environnement sur le comportement, d’autre part, il met en évidence l’impact de cet environnement sur les capacités cognitives d’une population de souris.

Hebb est l’auteur de multiples expériences qu’il a conduites et qui permettent de le placer comme une référence dans les neurosciences cognitives et l’intelligence artificielle. Il démontre en 1947 que des souris élevées comme des animaux domestiques résolvent mieux les problèmes et les exercices qui leurs sont soumis qu’un autre groupe de souris élevé en cage. Il souligne en particulier l’impact d’un environnement favorable pendant les 3 premières semaines de vie des souris sur leur comportement à l’âge adulte. Ses travaux déclinés dans de nombreuses situations se focalisent essentiellement sur une analyse observationnelle. En neuropsychologue, Hebb se passionna pour la compréhension de la réaction comportementale d’un animal soumis à des environnements plus ou moins stimulants.

Chez les rongeurs, l’exercice physique volontaire en roue d’activité a des effets bénéfiques sur la neurogénèse adulte hippocampique. En effet, des souris ayant accès à une roue d’activité montrent une augmentation de la prolifération cellulaire, de la survie neuronale et une accélération de la maturation neuronale, via une augmentation du nombre d’épines dendritiques.

Synthèse sur l'environnement enrichi

L’enrichissement signifiant suivant les protocoles, la vie en collectivité avec d’autres congénères, une stimulation sensorielle particulière associée à de la lumière, des odeurs… mais aussi des exercices plus ou moins complexes soit pour parvenir à boire ou à s’alimenter.

C’est plus tard et notamment au cours des années 60, avec l’équipe de chercheurs américains composée de Bennett, Diamond, Krech & Rosenzweig, que la notion d’environnement enrichi révèle son potentiel.

Comparant différents types d’environnements, les uns appauvris, les autres enrichis, des expériences répétées ont permis d’établir une véritable correspondance entre l’enrichissement de l’environnement et le volume et l‘épaisseur du cortex cérébral.

Synthèse sur l’environnement enrichi: De nombreuses expériences sur le modèle murin

L’une des expériences phare conduite par l’équipe du laboratoire américain de l’Institut national de Santé mentale (National Institute of Mental Health), comparent une exposition pendant une durée d’un mois d’un groupe de rat à ce qu’ils appellent ECT (Environment complexity & Training) c’est-à-dire un environnement complexe et stimulant, d’un autre groupe de rat placé en IC (Isolated conditions) autrement dit à l’isolement.

Une exposition est programmée par séquence de 30 minutes par jour pour le groupe ECT, dans un espace stimulant les fonctions cognitives dans lequel des croquettes sucrées étaient distribuées à chaque succès dans la résolution d’un problème. La composition de cet espace étant modifié chaque jour. Pendant ce temps, le groupe IC restait dans une cage aux trois côtés fermés et avec un accès non restrictif à la nourriture et à l’eau.

Ce lien établi, a donné l’occasion de la publication d’un article en 1964, intitulé « l’effet d’un environnement enrichi sur l’histologie du cortex cérébral de rats », qui furent après les travaux de Hebb, le point de départ de nombreuses recherches sur le concept d’environnement enrichi – principalement nommé enriched environment, car l’essentiel des travaux et publications qui suivirent furent d’origine anglo-saxone.

Cette observation constitua une forme de révélation car il était acquis jusque-là que le poids et la structure du cerveau étaient stables et insensibles à toute forme d’influence du milieu.

Synthèse sur l’environnement enrichi: des recherches conduites par des neurobiologistes et des sociologues

L’idée que l’environnement puisse avoir un effet sur le comportement ou les capacités cognitives était une donnée globalement acquise… soutenue par les différentes observations faites sur des individus en fonction du milieu dont ils étaient originaires. Cela participait et renforçait les théories associées à l’éducation. Par contre que le cerveau de souris puisse s’accroître et se ramifier en fonction de l’exposition à l’environnement, et qu’il contribue à en modifier la taille et la structure ouvrait un univers de curiosité qui fut ensuite explorées régulièrement par des équipes de neurobiologistes, sociologues dans le monde entier.

Il faut noter qu’à cette époque et pendant les décennies qui suivirent, les expériences furent conduites à quelques rares exceptions près, au niveau animal, principalement avec des rats voire des chimpanzés. Les indications qui permettaient de qualifier un environnement enrichi pour un rat ne laissant par conséquent peu de pistes voire aucun indice sur ce qu’il devrait être, si l’on envisageait une transposition à l’homme.

De nombreux recherches complémentaires furent conduites au cours des décennies qui suivirent afin d’explorer l’impact de cet enrichissement a un effet positif sur les transmissions synaptiques et la neurogénèse. Rarement transféré au niveau de l’humain, cet ensemble d’expériences permirent d’identifier les mécanismes par lesquels l’environnement pouvait avoir un impact sur l’expression des gènes dans le cortex cérébral.

Progressivement, au rythme des travaux conduits par différents laboratoires, se forge une compréhension nouvelle du lien étroit qui se tisse entre le cerveau et l’atmosphère, l’ambiance auquel il est soumis.

Les champs d’investigation s’élargissent. Après avoir été décrit aux Etats-Unis, l’environnement enrichi fait le tour du monde, soumettant des bataillons de souris et de rats à des protocoles variés et vérifiant combien son impact sur le comportement, la mémoire, la cognition, l’appétit, la dépression est significatif :

  • Une équipe de chinois démontre que l’hypo-perfusion cérébrale chronique risquant de provoquer des troubles cognitifs par une expression réduite de CREB phosphorylé, est compensée par un EE.
  • Puis des japonais confirment que l’EE permet de compenser les déficiences de mémoire de souris avec une mutation PACAP -/-
  • Ensuite des  indiens soulignent que l’EE permet de réduire le risque de syndrome dépressif chez des souris affectées par des troubles cognitifs et restaure la plasticité synaptique anormale de l’hippocampe.
  • Des israéliens de l’Université Ben Gourion démontrent que des souris exposées à un environnement enrichi ont montré un net progrès dans la guérison des lésions cérébrales. Utilisant le test de reconnaissance d’objets nouveaux et d’orientation à l’intérieur de labyrinthes, ils ont tenté de déterminer le niveau de fonctionnement mémoriel et cognitif des souris placées dans des cages standard par rapport à celles se trouvant dans des environnements enrichis – cages plus grandes contenant des stimuli supplémentaires, des roues pour courir, de la nourriture et de l’eau en quantité, un espace ouvert, et des objets à explorer régulièrement changés.

 

L’environnement enrichi et l’autisme

Sur la base des modèles d’environnement enrichi conçu pour des souris, Cynthia Woo a développé un programme d’études à l’Université de Californie à Irvine, pour envisager des alternatives possibles sur des enfants autistes. Une publication en 2015 a mis en valeur l’intérêt d’une telle approche :

L’environnement enrichi et la maladie d’Alzheimer

Cette notion a été essentiellement étudié sur des rats de laboratoires et des primates et ses mécanismes furent valorisées particulièrement en faveur de l’autisme.

Par la suite, dans les années 2000, N Berardi et L Maffei, mirent en évidence l’impact positif d’un environnement enrichi sur l’évolution de la maladie d’Alzheimer sur une population de rats – et en particulier l’évolution des troubles cognitifs.

Le jardin : un environnement enrichi ?

Le jardin bénéficiait comme on le décrivait tout à l’heure d’une image positive dont les vertus s’étalaient sur toute la palette des activités humaines. Il a été décliné dans toutes les cultures et civilisations sur l’horizon des rêves. Chaussant ses pieds dans les nuages, l’homme a avancé vers le jardin et l’a conçu à pas feutrés pour lui donner une dimension divine, religieuse, philosophique, politique, sociale, familiale, alimentaire, médicinale.

Assurément, le jardin est un espace idéal pour y projeter les vertus découvertes récemment par ces équipes de chercheurs du monde entier, de l’environnement enrichi. (EE).

Cette transposition vers le jardin s’appuyait sur la convergence vers un lieu culturellement perçu comme un espace bienveillant, de réflexions d’équipes pluridisciplinaires de professionnels de santé pour en envisager l’enrichissement.

Synthèse sur l'environnement enrichi

Ainsi, la mission thérapeutique du jardin n’était pas parfaitement établie. Les études cliniques que nous avons menées ont démontré que le jardin en lui-même ne suffisait pas à déployer le potentiel de soins attendu, et que pour devenir thérapeutique, il fallait l’enrichir en fonction des cibles et des pathologies prises en charge. Cette quête d’un enrichissement vertueux fut le point de départ des travaux de recherches en collaboration avec des équipes pluridisciplinaires de l’APHP et le Laboratoire d’Education et Pratiques en Santé (LEPS) de l’Université Paris 12.

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Publications sur les jardins thérapeutiques

Il existe une assez importante base documentaire sur les jardins thérapeutiques. Certaines publications se contentent d’en donner une définition, d’autres résultent d’un travail exploratoire de l’existant.

Il est possible de distinguer 3 types majeurs de publications sur les jardins thérapeutiques.

  • La conception du jardin thérapeutique ou « healing garden »
  • L’utilisation et l’animation d’un jardin thérapeutique
  • Les publications scientifiques sur les jardins thérapeutiques

Cette page ne s’inscrit pas en « critique littéraire » avec l’intention de classer ces différents ouvrages ou articles en fonction de leur intérêt ou contribution aux connaissances acquises dans le domaine.

La conception d’un jardin thérapeutique

Plusieurs ouvrages constituent actuellement de bonnes références :

  • Daniel Winterbottom – Amy Wagenfeld : » Therapeutic Gardens, Design for healing spaces » (2015) – Timber Press
  • Clare Cooper Marcus – Naomi A. Sachs : « Therapeutic Landscapes – An evidence -Based Approach to designing healing gardens and restorative outdoor spaces » (2014) – Wiley
  • Clare Cooper Marcus – Roger S Ulrich – Marni Barnes and al. : »Healing Gardens – therapeutic benefits and design recommendations » (1999) – Wiley
  • Sue Minter : »The healing garden – a practical guide for physical and emotional well-being » (1993) – The eden project books
  • Jérôme Pélissier :  » Jardins thérapeutiques et hortithérapie » (2017) – Dunod
  • Fondation Méderic-Alzheimer : Guide pratique jardin, conception et élaboration de jardins à l’usage des établissements médico-sociaux et sanitaires 

Aucun de ces ouvrages ne fait cependant références aux jardins enrichis et une approche clinique du jardin, vraisemblablement aussi, parce que les premières communications que nous avons faites sur le sujet datent de fin 2015.

L’utilisation et l’animation d’un jardin thérapeutique

Il n’existe pas à notre connaissance d’ouvrage complet sur le sujet- mais on trouvera de nombreux petits guides, ou des chapitres consacrés à l’intérieur des livres pré-cités.On pourra ajouter quelques références cependant :

Denis Richard : »Quand Jardiner soigne » (2011) Delachaux et Niestlé

Nancy Bench: « The healing garden »  (2012) Grey House in the Woods

Les publications scientifiques

Elles sont très nombreuses et nous vous mettrons en ligne prochainement une revue systématique de littérature sur la question de recherche suivante:

 » le jardin thérapeutique en institution pour des populations psycho-gériatriques : quels bénéfices sur les troubles du comportement? »

  • T Rivasseau-Jonveaux : »Healing Gardens and Cognitive Behavioral Units in the Management of Alzheimer’s Disease Patients: The Nancy Experience » (2018) Journal of Alzheimer Disease
  • Edwards and al : » An evaluation of a therapeutic garden’s influence on the quality of life of aged care residents with dementia » (2013)- Dementia
  • Shukor and al. : »A Review of Design Recommendations for Outdoor Areas at Healthcare Facilities » (2012) – Journal of Therapeutic Horticulture
  • S Rodiek and al « Outdoor environments for people with dementia » (2007) Journal of Housing for Elderly – Volume 21, 1/2
  • Bourdon E. and al : » les bienfaits des jardins enrichis pour les malades d’Alzheimer » – The Conversation Septembre 2021
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