Jardin enrichi et jardinières ergonomiques

Bien souvent l’installation d’un jardin dit « thérapeutique » se limite à l’implantation d’une ou plusieurs jardinières surélevées sur une terrasse au milieu de quelques massifs de lavande et de romarin. Qu’en est-il? Jardin enrichi et jardinières ergonomiques:

jardin enrichi et jardinières ergonomiques

Le choix d’une jardinière surélevée résulte de trois critères principaux :

  • ergonomie
  • usage
  • esthétique

De nombreux fabricants , qu’il s’agisse d’ateliers de menuiserie, d’assemblage bois ou de moulage en plastique ont développé des produits qui peuvent apporter des réponses intéressantes à l’activité de jardinage en EMS. Quelle place donner à ces jardinières dans un jardin et comment les implanter pour les valoriser au mieux.

La Fondation Thrive en Grande-Bretagne qui a fondé l’essentiel de sa démarche sur le principe de l’hortithérapie « Gardening for Health » (Jardiner pour être en bonne santé), a développé dans ce domaine une expertise largement partagée à travers ses activités de formation. Il faut reconnaître que la culture des britanniques les préparent très naturellement à se tourner vers le jardinage.

D’une façon générale, notre expérience – les verbatim que nous avons analysés à la suite d’ateliers de jardinage en EHPAD ou FAM nous invitent à adapter correctement la solution qui pourra être proposée en fonction des populations accueillies. La même adhésion à une activité de jardinage ne s’exprime pas de façon unanime par les résidents et l’ergonomie offerte par la surélévation des ateliers de jardinage n’apporte pas à elle seule la réponse à toutes les attentes.

Jardin enrichi et jardinières: Quelle ergonomie?

Elle constitue bien souvent la préoccupation majeure dans le design de ces « tables » de jardinage. Il s’agit alors de trouver  le bon compromis entre les différents enjeux:

– l’autonomie (enfant, adolescent, adulte, sujet âgé)

– les personnes à mobilité réduite et verticalisée

– celles qui ne se déplacent qu’en fauteuil (fauteuil simple ou  motorisé)

Ces différents éléments vont définir une hauteur du plan de travail, la hauteur nécessaire pour le passage des jambes sous le plan de jardinage, et par conséquent la profondeur de travail de la terre, mais aussi la surface de plantation accessible suivant que l’on est en position debout ou dans un fauteuil.

Il peut-être pertinent en fonction de ces différents enjeux d’ajuster le choix de sa table de jardinage afin d’avoir une solution qui s’adapte à tous. Une possibilité consistant à utiliser une table qui offre une ergonomie différente en fonction des personnes qui l’utilisent. Car la hauteur de travail debout n’est pas nécessairement compatible avec celle d’une personne assise.

L’usage

jardin enrichi et jardinières ergonomiques

Plusieurs articles ont été consacrés sur ce site aux activités de jardinage. Notre suggestion principale est de réserver une partie de ces jardinières à des cultures permanentes  de plantes condimentaires ou aromatiques. Leur cueillette permettra par exemple d’agrémenter l’assaisonnement des plats, et d’utiliser le reste comme un « tableau effaçable ». Sur ce plan de travail on organisera des séquences de jardinage (semis, jeunes plants, récolte) avant de transplanter les végétaux vers un espace potager, un massif ornemental ou des jardinières ornementales. En effet mobiliser ces jardinières, généralement de taille réduite, pendant toute une saison pour récolter des potirons à la Toussaint risque de démobiliser l’attention des résidents.

L’enjeu n’est pas de former des horticulteurs, mais de retrouver ou de partager un plaisir du jardinage entre la manipulation du végétal et de la terre, son observation, son évocation. C’est aussi respecter quelques séquences procédurales et des consignes, tout en offrant la récompense d’un goût partagé (manger des fraises muries au soleil, cueillir des fleurs pour décorer sa chambre…)

Jardin enrichi et jardinières ergonomiques: L’esthétique

Il est observable que bon nombre de ces jardinières ne sont pas des meubles très décoratifs et qu’ils vieillissent plus ou moins bien. La terre y est séparée du sol, si bien que les besoins en arrosage sont plus importants; d’autant que la nécessité de mettre à disposition une terre facile à travailler va privilégier le choix d’un terreau horticole qui se dessèche vite au soleil.

Leur forme, leur implantation n’offre pas toujours une esthétique suffisante pour encourager à leur utilisation. Leur dimension oblige à une activité de grande proximité entre résidents. Alors que certains apprécient le jardin pour y trouver un peu d’isolement vis à vis de la pression de la vie collective.

Une solution que nous avons développée qui tout en préservant l’ergonomie requise, consiste à former un talus ergonomique avec un soutenement en bois, de différentes hauteurs. Cette formule permet d’accompagner harmonieusement le profil d’un terrain.  Cela est l’occasion d’utiliser la terre qui est décaissée lors de la formation d’aller, de disposer d’un substrat plus hydrophile que l’on allègera avec un apport en terreau horticole.

Enfin, il est possible d’aménager le long d’un talus ainsi formé, des espace adaptés pour l’accès aux personnes à mobilité réduite. Plutôt que d’être confiné sur des dimensions réduites, le talus ergonomique agencé sur plusieurs mètres accompagnera la promenade dans le jardin, pourra être alternativement planté de végétaux adaptés à la cueillette (fleurs, fruits) et d’espaces adaptés à l’hortithérapie.

Il convient avant tout quelle que soit la solution retenue de s’assurer que ces espaces ergonomiques de cultures respecteront l’esprit d’un jardin, plutôt que de s’ériger comme un mobilier adapté pour personnes handicapées ou fragiles.

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Jardins enrichis et troubles du comportement

Les troubles du comportement désignent des signes et symptômes inadaptés qui se traduisent différemment en fonction des populations concernées et des pathologies. Jardins enrichis et troubles du comportement: une opportunité et une offre une médiation thérapeutique

Les troubles du comportement sont des signes ou des symptômes psychologiques et comportementaux. Ils se traduisent par des attitudes inadaptées aux situations ou au contexte. Ils sont observés variablement sur différents types de population en fonction des pathologies.

Les troubles du comportement du sujet âgé

De nombreux travaux et guides de recommandations sur les troubles du comportement chez le sujet âgé et en particulier les personnes atteintes de maladies neuro-dégénératives font actuellement référence. On notera en particulier :

Les troubles du comportement se caractérisent principalement par deux formes de manifestation:

– forme négative ou déficitaire : le sujet se place en retrait – apathie, adynamie, anxiété voire dépression – également appelés troubles psychologiques

– forme positive ou productive : le sujet devient perturbateur pour son environnement – agitation, agressivité, idées délirantes, cris, déambulation – également appelés troubles psychotiques

Ces deux formes de troubles du comportement sont évaluées sur des échelles reconnues telles que le NPI (NeuroPsychiatric Inventory) ou Cohen-Mansfield (état d’agitation). Ils en mesurent/

  • la fréquence (d’une fois par semaine à tous les jours, voire tout le temps),
  • la gravité (de peu perturbant à très perturbant pour le patient)
  • et le retentissement sur les activités des soignants ( de pas du tout à très sévère).

Nos travaux sur l’enrichissement du jardin se sont portés en particulier sur la médiation de:

Les troubles anxieux

Au sein d’un EHPAD, on identifie fréquemment de nombreuses personnes sujettes à des troubles anxieux, caractérisés par:

  • un isolement,
  • une opposition aux soins,
  • des troubles de l’appétit,
  • une demande d’attention supplémentaire
  • aphasie
  • apraxie

En situation de crise l’anxiété évolue vers des séquences d’agitation, d’agressivité voire de pleurs et de cris.

jardins enrichis et troubles du comportement

Le jardin thérapeutique enrichi réduit la manifestation des troubles anxieux

Les troubles anxieux s’évaluent en fonction du nombre, de l’intensité et de la durée des symptômes. Ils se traduisent aussi par une souffrance émotionnelle ou un retentissement marqué sur la vie du résident, des soignants, mais aussi des autres résidents à proximité. Un des objectifs important associé à la prise en charges des troubles anxieux, consiste en l’amélioration du diagnostic des symptômes cliniques et de leur origine afin de proposer une réduction de la prescription de psychotropes.

Il convient dans un premier temps de poser un diagnostic précis sur les sujets anxieux , et d’organiser une prise en charge par le jardin dans la mesure où celui-ci a été enrichi en correspondance avec l’anxiété. Sachant que la comorbidité des troubles anxieux est généralement associée à un état dépressif, des détériorations cognitives et des affections somatiques – notamment pour les cas d’épisodes dépressifs majeurs (EDM).

Jardins enrichis et troubles du comportement: La plainte anxieuse

Compte tenu de l’enjeu pour la santé, la plainte anxieuse et les symptômes somatiques nécessitent bien souvent une prise en charge prioritaires par les soignants des personnes concernées. Cette prise en charge conduit à une mobilisation importante des soignants sur des séquences individuelles qui se fait au détriment des autres résidents pour des soins:

  • individuels
  • différés
  • négociés

Une adaptation du programme de soins de l’établissement en valorisant un jardin enrichi, peut donc présenter des retentissements multiples:

  • réduction des troubles anxieux et bien-être des résidents concernés
  • moins de perturbation pour les résidents à proximité et les soignants
  • davantage de disponibilité pour les soignants en faveur des résidents

Nous avons actuellement élaboré un profil type de l’enrichissement d’un jardin thérapeutique à l’attention des sujets anxieux et envisageons une série d’études afin d’en optimiser le protocole de fréquentation.

Jardins enrichis et troubles du comportement: L’agitation et l’agressivité

Le Pr J. Cohen-Mansfield a validé une échelle d’évaluation de l’agitation du sujet âgé qui permet d’évaluer un patient sur une durée déterminée pour apprécier la pertinence de la mise en place d’un traitement ou de mesures adaptées à ses troubles du comportement.

Il a été suggéré que les comportements inappropriés reflétaient une défaillance de l’environnement à satisfaire les attentes du patient. Cette suggestion trouve également  une résonance dans les études menées sur l’environnement appauvri. Et le jardin en cela peut constituer un espace de compensation à ces défaillances de l’environnement intérieur. Encore faut il que ce jardin dispose des aménagements requis.

En 2008, M Detweiler publie dans l’American Journal of Alzheimer’s Disease & Other Dementias les résultats d’une étude sur l’impact de la fréquentation d’un jardin sur les troubles du comportement. Il évalue sur l’index d’agitation de Cohen Mansfield, et les conclusions donnent un signal encourageant en faveur de la réduction de ces troubles. Préalablement, Cohen-Mansfield avait mené une enquête auprès  des directeurs de 320 établissements gériatriques aux Etats Unis.

Une enquête publiée dans Alzheimer Disease and Associated Disorders

Cette enquête publiée en 1999 dans le journal Alzheimer Disease and Associated Disorders, soulignait parmi les facteurs facilitant l’apparition des troubles d’agitation: la possibilité d’avoir ou non un accès libre au jardin. Bien souvent, les portes verrouillées pour des motifs de sécurité se révèlent être un facteur aggravant. Par ailleurs c’est une des rares enquêtes, qui s’est efforcée de recenser les aménagements présents dans le jardin.

Il n’y apparait pas la notion de jardin enrichi, et les observations se concentrent sur la dimension paysagère du jardin (arbres , massifs ornementaux, bassins…).

Les études cliniques préliminaires que nous avons conduites ont démontré l’intérêt d’un enrichissement spécifique du jardin. Ceci afin d’obtenir dans la durée une réduction significative de la fréquence et du retentissement de l’agitation et de l’agressivité. Nos efforts convergent vers la définition détaillée de chacun des éléments susceptibles de former efficacement un jardin thérapeutique capable de les prendre en charge et d’en réduire les manifestations.

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Jardin enrichi et écologie humaine

Quelle inspiration pour notre démarche sociétale? Le jardin enrichi et écologie humaine ont ils des points de convergence ?

Le courant pour une écologie humaine

C’est un laboratoire de transformation personnelle et sociétale au service de tout l’homme et tous les hommes. Il est fondé sur une anthropologie réaliste qui situe l’homme à sa juste place dans le monde vivant. 

Le CEH est né dans un contexte historique :

* l’impasse de la modernité, de l’individualisme intégral et de l’ultra-libéralisme qui déshumanisent et détruisent la biosphère.

* Une foule d’initiatives alternatives engagées par des personnes au service de l’homme et du milieu vivant.

Le CEH propose à ceux qui le rejoignent de se situer comme acteurs à hauteur d’homme. Là où ils se trouvent, avec les capacités et les talents qu’ils ont, pour construire une Société de Bien Commun (SBC).

Jardin enrichi et écologie humaine

Il leur propose :

  • Manifeste qui offre trois clés pour cette transformation : bienveillance, communs et vulnérabilité,
  • Formation anthropologique expérimentale et pratique à suivre en équipe, qui permet à chacun de s’outiller pour se situer, s’enraciner. Lui permet de s’ouvrir, se relier, habiter, travailler, cultiver, prendre soin, pacifier et mieux contribuer à la construction de cette SBC,
  • Publications qui donnent voix à des acteurs déjà engagés dans cette transformation au cœur de leurs activités,
  • Chemins d’action sectoriels et des outils pour ceux qui veulent rechercher et mettre en œuvre pratiquement cette transformation. Agriculture, travail, habitat, santé, éducation, culture, insertion sociale, justice, numérique, journalisme, finance.

Jardin enrichi et écologie humaine: La société de biens communs

Un article publié dans le 4ème volume décrit le concept de jardin thérapeutique enrichi .

Nos vulnérabilités sont des portes qui peuvent s’ouvrir sur la joie de la rencontre, l’exaltation de l’échange, la douceur du soin donné ou reçu. C’est ce dont témoignent ici des acteurs du bien commun. Ils se sont consacrés aux personnes âgées ou en situation de handicap, aux malades du cancer, aux leaders en burn out ou à notre vitale biodiversité…

La conscience de notre vulnérabilité commune nourrit ainsi la seule ambition qui vaille : celle d’agir ensemble là où nous sommes enracinés pour adapter, réparer, voire embellir notre monde, et accéder à l’espérance.

jardin enrichi et écologie humaine

Extrait de l’article

« Nous avons une image fantasmée du jardin. Jardins de Babylone, ceux de Perse, du Japon, de la Chine ou de l’ère médiévale… Ces lieux où nous retrouvons un lien avec la nature seraient comme magiques, salvateurs et chargés de bienfaits thérapeutiques. Cette idée communément admise a-t-elle des fondements scientifiques ? Pour exercer au mieux ma profession – créer des jardins thérapeutiques pour aider les personnes malades et vulnérables – il m’a fallu étudier cette question et mesurer les effets provoqués par ces espaces.

À travers mes diverses expériences de l’enfance et de l’adolescence, en regardant les étoiles ou gravissant les montagnes, en cultivant un potager ou parcourant les forêts, j’ai saisi la différence fondamentale entre la nature sauvage, majestueuse et parfois effrayante, avec la nature domestiquée dans un jardin créé par l’homme.

Parcourant la littérature scientifique, j’ai découvert le concept d’healing garden (jardin thérapeutique). Son affirmation est simple : le jardin soigne !  Mais il semblait difficile d’en discerner l’efficacité et les mécanismes. S’agissait-il de tous les jardins ? Bien souvent, les articles concluaient en suggérant de faire des recherches complémentaires, pour s’assurer de la façon dont le jardin apportait cette part de soins évoquée.

Parmi les premiers, Roger S. Ulrich démontre que le temps de convalescence post-opératoire d’un patient est réduit lorsque la fenêtre de sa chambre lui offre la vue sur un arbre. De nombreuses autres études suivent : chacune s’efforce de confirmer les vertus thérapeutiques du jardin. Mais nulle ne semble véritablement solide, si ce n’est dans ses affirmations… » (lire la suite en cliquant sur l’icône de l’article)

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